Le compte à rebours est lancé. Dans exactement six mois, le Mondial 2026 donnera son coup d’envoi entre les États-Unis, le Canada et le Mexique. Première édition à 48 équipes, premières tensions géopolitiques explosives, et déjà des favoris qui se détachent : l’Espagne championne d’Europe, l’Argentine de Messi en quête de doublé historique, et une France de Mbappé qui rêve d’effacer la désillusion qatarie. Décryptage complet d’un tournoi qui s’annonce hors norme.
Six mois. C’est tout ce qui nous sépare du plus grand événement sportif de la planète. Le jeudi 11 juin 2026, le ballon roulera enfin sur les pelouses nord-américaines pour une Coupe du monde qui promet de redéfinir l’histoire du football mondial. Et cette fois, tout change vraiment.
Un format inédit qui bouleverse les codes
Fini le Mondial à 32 équipes que nous connaissions depuis 1998. La FIFA passe à 48 nations qualifiées, réparties en douze groupes de quatre. Une révolution qui modifie profondément la physionomie de la compétition. Les huit meilleurs troisièmes accéderont aux seizièmes de finale, créant ainsi des possibilités inédites pour les outsiders et les petites nations.
Curazao, par exemple, devient le plus petit pays jamais qualifié pour une phase finale de Coupe du monde. Cette île caribéenne de 150 000 habitants va défier l’Allemagne, l’Équateur et la Côte d’Ivoire dans le groupe E. Improbable ? Oui. Impossible ? Plus maintenant, justement grâce à ce nouveau format qui offre plus de chances aux audacieux.
Le tournoi se déroulera du 11 juin au 19 juillet 2026, soit un retour au calendrier estival traditionnel après l’exception qatarie de novembre-décembre 2022. Trois pays hôtes se partageront l’organisation : les États-Unis avec onze villes (Atlanta, Boston, Dallas, Houston, Kansas City, Los Angeles, Miami, New York-New Jersey, Philadelphie, San Francisco, Seattle), le Mexique avec trois villes (Guadalajara, Mexico, Monterrey), et le Canada avec deux villes (Toronto, Vancouver).
Un défi logistique monumental. Les équipes devront composer avec des distances folles entre les stades, des fuseaux horaires différents, et des climats variés. Certaines rencontres se joueront sous une chaleur écrasante au Texas ou en Floride, d’autres dans la fraîcheur de Vancouver ou de Seattle. Cette dimension géographique ajoutera un paramètre stratégique crucial.
L’Espagne arrive en conquérante absolue
Si le tournoi débutait aujourd’hui, l’Espagne serait le favori numéro un. Les champions d’Europe en titre ont tout simplement écrasé l’Euro 2024 avec un football flamboyant, offensif et terriblement efficace. Luis de la Fuente a bâti une machine qui fait trembler toute l’Europe.
Lamine Yamal et Nico Williams forment l’une des meilleures paires d’ailiers au monde. Le prodige barcelonais, qui aura 19 ans pendant le Mondial, arrive en pleine maturité physique et technique. Sa vitesse, sa créativité et son audace en font déjà un candidat au statut de star planétaire du tournoi. Williams, de son côté, apporte puissance et percussion depuis l’autre côté du terrain.
Au milieu de terrain, la Roja possède une richesse de talents presque embarrassante. Rodri, récemment blessé mais attendu pour le Mondial, reste le métronome. Pedri, Martín Zubimendi, Fabián Ruiz, Gavi : chacun offre quelque chose de différent. L’équilibre entre conservation du ballon et créativité offensive est parfaitement maîtrisé. Mikel Merino s’est même imposé comme un faux numéro 9 révolutionnaire, capable de dérouter n’importe quelle défense.
Derrière, Pau Cubarsí, Marc Cucurella, Dani Vivian et Dean Huijsen assurent la stabilité défensive. Unai Simón et David Raya se disputent le poste de gardien titulaire, offrant deux options de très haut niveau. Seule faiblesse identifiée : le manque d’un avant-centre pur, tueur de métier. Mais jusqu’ici, l’Espagne a brillamment compensé par le mouvement collectif et la multiplication des menaces.
L’Argentine veut entrer dans la légende
Lionel Messi peut-il réaliser l’impossible ? Gagner deux Coupes du monde consécutives reste l’un des exploits les plus rares du football. Depuis le Brésil de Pelé en 1958 et 1962, aucune nation n’y est parvenue. L’Argentine de Lionel Scaloni se donne les moyens d’y croire.
Sur le papier, cette équipe semble moins impressionnante que certaines concurrentes. Mais Scaloni a prouvé qu’il savait créer un système où le collectif transcende les individualités. L’Argentine a appris à gagner sans Messi ces dernières années. Et quand la Pulga est là, elle devient presque imbattable. Son récent sacre en MLS Cup avec Miami démontre qu’à 38 ans (39 pendant le Mondial), il reste un compétiteur d’exception.
Julián Álvarez, Lautaro Martínez, Franco Mastantuono et Giuliano Simeone offrent des options offensives variées. Le milieu de terrain, avec Rodrigo De Paul, Enzo Fernández et Alexis Mac Allister, possède l’équilibre parfait entre récupération et construction. Emiliano Martínez restera le gardien titulaire – un avantage psychologique énorme après ses performances héroïques au Qatar.
En défense, Cristian Romero, Nahuel Molina, Gonzalo Montiel et Nicolás Tagliafico connaissent le système par cœur. Le groupe I avec la France, le Sénégal et la Norvège ne sera pas une promenade, mais l’Albiceleste a les armes pour passer. Et après ? Dans les matchs à élimination directe, l’expérience acquise au Qatar pourrait faire toute la différence.
La France de Mbappé veut se racheter
Finalistes en 2022, champions du monde en 2018, les Bleus reviennent avec un statut clair : prétendants au titre. Didier Deschamps, qui quittera son poste après le Mondial, veut partir sur un triomphe. Et pour cela, il dispose d’un vivier de talents presque insolent.
Kylian Mbappé entre dans son prime. Le capitaine du Real Madrid affiche une maturité nouvelle. Et surtout, il est désormais entouré d’un casting offensif de folie. Ousmane Dembélé vient de remporter le Ballon d’Or – une consécration qui confirme son statut. Désiré Doué, Michael Olise, Bradley Barcola, Rayan Cherki : la nouvelle génération pousse fort et offre une profondeur de banc terrifiante.
Au milieu, Aurélien Tchouaméni et Eduardo Camavinga du Real Madrid apportent l’expérience des très hauts sommets. Le reste du secteur reste à définir, mais les options ne manquent pas. Mike Maignan s’est imposé comme le gardien titulaire, libérant les cages avec autorité et précision.
Défensivement, William Saliba, Ibrahima Konaté, Jules Koundé et Theo Hernández forment une ligne arrière solide, rapide et technique. La France a tout : la qualité individuelle, la profondeur de banc, l’expérience des grands rendez-vous. Mais après la finale perdue face à l’Argentine, une question demeure : cette équipe a-t-elle le mental pour aller jusqu’au bout ?
Le groupe I avec le Sénégal, la Norvège d’Haaland et un barragiste intercontinental sera relevé. Mais Deschamps sait gérer les phases de poules. C’est dans les matchs couperets que tout se jouera.
L’Angleterre change de braquet avec Tuchel
Après des années d’échecs douloureux malgré une génération exceptionnelle, les Three Lions ont frappé un grand coup : l’arrivée de Thomas Tuchel. Le tacticien allemand, réputé pour son génie dans les compétitions à élimination directe (vainqueur de la Ligue des champions avec Chelsea), pourrait être la pièce manquante du puzzle anglais.
L’effectif parle de lui-même. Harry Kane, Bukayo Saka, Marcus Rashford en attaque. Jude Bellingham, Declan Rice, Cole Palmer au milieu – un trio capable de dominer n’importe quel adversaire. Jordan Pickford dans les buts, solide et expérimenté.
Derrière, Harry Maguire, John Stones, Marc Guéhi, Reece James, Trent Alexander-Arnold offrent des solutions variées. Et la profondeur ? Phil Foden, Eberechi Eze, Noni Madueke, Elliott Anderson, Morgan Rogers… La liste est vertigineuse.
Leur seule faiblesse ? Eux-mêmes. L’Angleterre a prouvé qu’elle pouvait dominer techniquement et tactiquement. Reste à prouver qu’elle peut gérer la pression des moments décisifs. Avec Tuchel aux commandes, l’espoir renaît. Le groupe L avec la Croatie, le Ghana et le Panama devrait être négocié sereinement.
Le Portugal joue la carte Ronaldo une dernière fois
À 40 ans, Cristiano Ronaldo aura une ultime occasion de décrocher le seul trophée qui manque à son palmarès légendaire. Roberto Martínez continue de lui faire confiance comme avant-centre titulaire, et CR7 continue de marquer régulièrement pour Al-Nassr en Arabie Saoudite.
Mais cette fois, Ronaldo n’est plus seul. Le Portugal possède enfin la profondeur de talent que ses années de prime méritaient. Rafael Leão, Pedro Neto, Francisco Conceição, Gonçalo Ramos : les options offensives sont multiples. Le milieu de terrain brille par sa jeunesse dorée : João Neves et Vitinha, deux prodiges qui impressionnent déjà au plus haut niveau européen.
Bruno Fernandes, Bernardo Silva, Rúben Neves complètent l’échiquier. Diogo Costa s’est imposé comme un gardien de classe mondiale. En défense, Rúben Dias, Nuno Mendes, Gonçalo Inácio, António Silva forment une ligne solide.
Deux problèmes subsistent : le poste de latéral droit reste fragile, et la dépendance à Ronaldo pourrait devenir un handicap si le phénomène portugais ne retrouve pas son efficacité des grands soirs. Le groupe K avec la Colombie, l’Ouzbékistan et un barragiste intercontinental semble accessible. Mais après ? Tout dépendra de l’état physique et mental de CR7.
Et les États-Unis dans tout ça ?
Les hôtes américains ne gagneront probablement pas le Mondial. Soyons réalistes. Mais Mauricio Pochettino a posé des fondations solides pour une performance honorable à domicile. L’USMNT a terminé l’année 2025 sur une série de cinq matchs sans défaite contre des équipes qualifiées pour le Mondial.
2-0 contre le Japon, 1-1 contre l’Équateur, 2-1 contre l’Australie, 2-1 contre le Paraguay, et même 5-1 contre l’Uruguay : les résultats parlent d’eux-mêmes. Et ce, sans disposer systématiquement de Christian Pulisic, Antonee Robinson, Yunus Musah ou Tyler Adams.
L’équipe montre du caractère, de la combativité, et une meilleure compréhension du système de Pochettino. Le groupe D avec le Paraguay, l’Australie et un barragiste européen (probablement la Turquie) est abordable. Une qualification pour les huitièmes de finale semble réaliste. Après ? Un exploit reste possible, mais il ne faudrait pas trop rêver.
Le soutien du public américain sera colossal. Les stades afficheront complet. L’ambiance sera électrique. Pour les joueurs américains, c’est l’occasion d’une vie. Pas de pression pour gagner, mais l’obligation de se montrer à la hauteur de l’événement.
Les outsiders qui peuvent faire mal
Le Brésil de Carlo Ancelotti possède des individualités de feu : Vinicius Jr, Raphinha, Alisson, Gabriel… Mais la Seleção manque cruellement d’équilibre au milieu et peine face aux très grosses nations. Leur groupe C avec le Maroc, l’Écosse et Haïti devrait passer. La suite dira si Ancelotti a trouvé la formule magique.
L’Allemagne de Julian Nagelsmann s’appuie sur Joshua Kimmich, Jamal Musiala, Kai Havertz. Mais il manque encore de la profondeur et de l’expérience collective. Le groupe E sera un test intéressant face à l’Équateur et la Côte d’Ivoire.
Les Pays-Bas ont une défense solide avec Virgil van Dijk et Jurrien Timber, un milieu polyvalent avec Frenkie de Jong, Ryan Gravenberch et Tijjani Reijnders. Mais il manque un avant-centre de classe mondiale et un gardien d’élite. Le groupe F contre le Japon et la Tunisie sera révélateur.
Dans six mois, tout sera clair. Les héros seront célébrés, les déceptions seront pleurées. Mais d’ici là, place aux spéculations, aux rêves et aux espoirs. Le Mondial 2026 s’annonce comme l’un des plus ouverts de l’histoire. Et c’est peut-être exactement ce dont le football avait besoin.
